Fédération de l’habitat réversible

Loi d’orientation et d’avenir agricole

Apporter des solutions de logement aux nouveaux actifs agricoles pour faciliter leur installation

Contexte

Un projet de loi d’orientation et d’avenir agricole (PLOAA) devrait être examiné par le parlement au 2nd semestre 2023. Une concertation a eu lieu au printemps 2023 avec différents acteurs et ses conclusions rendues publiques début juin. Le pacte et le PLOAA devraient contenir un volet législatif de mesures pour faciliter les installations agricoles. Nos organisations et collectifs y voient une opportunité pour défendre l’habitat réversible auprès des parlementaires. Selon nous, le public estime légitime que les agriculteurs puissent vivre sur leurs terres tout en ayant conscience des nombreux freins, en particulier financiers et fonciers, qui entravent l’installation de nouveaux agriculteurs.

Aujourd’hui, l’habitat réversible, c’est à dire sans emprise au sol et démontable, permettrait d’œuvrer à atteindre les objectifs du Zéro artificialisation nette (ZAN) que doivent tenir chaque commune et de s’assurer que les futures constructions ne seront pas détournées de l’activité agricole en cas d’arrêt de celle-ci. Enfin, le coût modeste de ces constructions réversibles renforcerait l’attractivité des activités agricoles pour des candidats à l’installation.

1. L’accès au logement, un frein à l’installation des nouveaux exploitants agricoles

La moitié des agriculteurs français doivent partir à la retraite d’ici 10 ans. Des millions d’hectares de terres vont devoir trouver repreneur. Pour maintenir le nombre d’actifs agricoles, il faudrait 220.000 installations en 10 ans.

En 2022, d’après les données disponibles, le prix de la terre agricole non batie varie de 500 € l’hectare en Ardèche à 57 980 € l’hectare dans le Var, variant fortement également en fonction de leur usage (vignes, céréales, pâturage, maraîchages, jachères…). Loin des préoccupations vivrières et productives, ces terres agricoles sont en passe de devenir un « actif » comme un autre et objet de spéculation d’investisseurs sans lien avec la profession agricole (« Immobilier : investir sur des terres agricoles« , Les échos, 1er juin 2022). Le prix élevés des terres agricoles est donc un facteur important d’endettement et un frein à l’installation de nouveaux arrivants dans la profession. 

Par ailleurs, la difficulté à trouver un logement en bon état, peu coûteux, peu énergivore et proche de l’exploitation freine de nombreux candidats à l’installation ou les met dans des situations financières et psychologiques déstabilisantes (obligation de nombreux aller/retours quotidiens, coût du carburant, éloignement de la famille…).

D’autre part les logements sociaux, principalement à proximité des zones urbaines, sont éloignés des exploitations en zone rurale.

Cette situation est encore aggravée par la pression immobilière sur les régions les plus touristiques, réduisant autant l’offre de logements disponibles qu’augmentant fortement les prix à la location.

Ces difficultés concernent également les travailleurs agricoles saisonniers, qui pourraient aussi bénéficier le temps des saisons de l’accès à des logements réversibles sur les fermes.

Enfin, la transmission de l’habitat du cédant n’est pas si facile, car ce qui se faisait avant par filiation directe entre « père et fils » n’est pas possible avec des personnes « non issues du monde agricole » (NIMA). Ceci sans compter la valeur émotionnelle et l’attachement au bien immobilier qui a fait partie de l’identité du cédant toute une vie, et dont le déménagement et la transmission sont bien souvent difficiles.

2. Le logement de fonction de l’exploitant agricole : état actuel de la réglementation 

Sont autorisées «… les constructions et installations nécessaires à l’exploitation agricole… » (R.151-23, R.161-4, L.111-4 du Code de l’urbanisme). La construction en zone Agricole d’un logement de fonction pour le chef de l’exploitation peut être autorisée dans le cas où la présence de l’agriculteur sur l’exploitation est indispensable à l’exercice de son activité.

Dans le cadre de sa demande d’autorisation, le demandeur doit apporter la preuve que sa présence permanente sur site est nécessaire. Aujourd’hui, SEULES les activités de production animale (pour la surveillance, le vêlage, la traite…) ou des cultures spécifiques nécessitant des soins constants sont reconnues comme nécessitant une présence rapprochée pour un bon fonctionnement de l’exploitation agricole. 

Une dérogation de construction en zone A doit être obtenue préalablement auprès de la chambre d’agriculture et trois points sont examinés :

– La réalité du statut d’agriculteur (activité principale, seuil minimal d’installation)
– La nécessité de la présence rapprochée et permanente de l’exploitant
– L’adéquation entre l’activité de l’exploitation et les caractéristiques de la demande de construction (surface de la maison). La surface de la maison d’habitation peut être examinée tout comme la résidence actuelle du demandeur.

Or, les critères des chambres d’agriculture pour l’autorisation dérogatoire de construire sur terrain agricole pour un exploitant ne présume que d’une construction « en dur » sur des fondations. Ces critères mériteraient donc d’être réinterprétés et mis à jour pour intégrer de nouvelles activités agricoles et l’habitat réversible.

La réglementation actuelle ne fait pas de différence entre les cultures végétales, qui sont exclues du champ des dérogations : céréales, maraîchage type « légume de plein champ » (ex: ferme de plusieurs dizaines d’hectares avec salariés et forte mécanisation) et le maraichage « petite surface diversifié » (ex : ferme de moins de 5ha en individuel ou avec 1 salarié, avec forte diversité de production et peu mécanisé).

La réglementation actuelle exclut donc les activités de maraîchage des dérogations accordées pour l’installation d’un logement de fonction sur l’exploitation d’un agriculteur. Cette réglementation, désormais datée, ne tient pas suffisamment compte de nouvelles contraintes liées au dérèglement climatique pour les maraîchers comme : la mise en place quotidienne de protection physiques et/ou thermiques ; la surveillance et le contrôle des ravageurs ; arrosages à des horaires précis (plusieurs fois par jour pour des semis en période sèches, le soir pour éviter les brûlures ou l’évaporation en période de sécheresse…) ;  intervention rapide en cas d’aléas météo soudain (vent, grêle, forte pluie…). Le vol, de matériel ou de récoltes (phénomène dit des « pilleurs de serre »), est également une préoccupation des exploitants, et justifierait de leur présence permanente.

Toutefois, il existe des variations d’un département à un autre, certaines doctrines, minoritaires, admettent déjà que le maraîchage nécessite une présence permanente de l’agriculteur sur son exploitation. Le Département d’ Ille et Vilaine a ainsi autorisé l’installation d’un logement de fonction pour la production légumière ou maraîchère nécessitant une proximité.

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